Quand je me suis lancée dans Projet Spécial, c'était pour donner une voix à mon fils Lucas. Étant donné qu'il est autiste et non-verbal, je me disais que le message sur son chandail aurait le pouvoir de faire dévier les regards de travers. De lui donner une voix, comme si c’était lui-même qui s’adressait aux gens.
D’un autre côté... il ne parle pas. Et s'il pouvait parler, est-ce qu'il me dirait qu'il ne les aime pas, les chandails? Et d'ailleurs, a-t-il seulement conscience de ces situations négatives que ledit chandail tente de désamorcer? Est-ce qu'au fond, ce ne serait pas moi que j'essaie de protéger?
Peu importe. Comme toutes les mères, je fais ce que je crois qui est bon pour lui , je fais de mon mieux, comme je le fais depuis 13 ans.
Je décris souvent mon fils comme quelqu’un d'heureux, tout simplement. Pas besoin de se casser la tête pour lui faire plaisir; une sortie au Dollarama équivaut une virée à la Ronde, un gâteau Betty Crocker emballé dans du papier de Noël c'est aussi trippant que de déballer un Play Station. Et pour les regards et les commentaires malveillants, comme on dit en anglais; '' ignorance is bliss ''. Si on a pas conscience du mal, on ne ressent pas le mal. D'ailleurs, n'y a rien d'honteux ou de gênant pour Lucas dans le fait de tenir la main de sa mère au magasin alors qu’il est aussi grand qu’elle. Ni à lui sniffer le coude, d'ailleurs! Lucas, c’est ce genre de personne là.
Comme nous le savons , le Trouble de spectre de l'autisme, ça ratisse large, très large. Il y a des personnes autistes qui peuvent s’exprimer avec des mots, décoder leurs émotions et les partager.
Revenons à Projet spécial.
Dans les mois qui ont suivi le lancement de notre Projet , j'ai eu la chance de rencontrer Stéphanie du blog Ma Banlieue, avec qui ça a cliqué tout de suite. Étant éducatrice spécialisée, elle a été en mesure de me donner un coup de main dans le cadre de certaines décisions scolaire pour un de mes garçons (TDAH, dyslexie , dysortographie). Pour moi, tout ça c'était un gros néant dans ma tête et les quelques minutes qu’elle a prises pour me rassurer on fait une grosse différence. Ce que je ne savais pas encore à ce moment , c’est qu’en parallèle, sa fille Margaux était elle-même en évaluation pour un TSA . Verdict final ? Elle est autiste, elle aussi.
HEIN ? ELLE ? ELLE À TELLEMENT PAS L’AIR AUTISTE ?
C'est le genre de remarque avec lesquelles elle doit déjà vivre, et qui vont probablement l'accompagner toute sa vie.
Ça allait donc de soi pour nous de lui offrir un chandail J'ai besoin d'espace car tsé la petite là , ELLE A BESOIN D’ESPACE ! C'est exactement aux personnes comme Margaux que nous pensions lorsque nous avons créé ce modèle.
Elle nous a envoyé un message. Elle , elle a une voix , contrairement à mon beau Lucas. Sa voix nous disait simplement : merci pour le chandail , j’espère que les gens vont enfin comprendre le message.
Margaux , tu as été la plus grosse paye que nous avons reçue jusqu'à présent. Parce que ce soir là, je me suis couchée convaincue que je faisais la bonne chose.
Merci Margaux.
Crédit photo : Step Von Rob pour @mabanlieue